À l’occasion des centaines de milliers de décès soudains du Covid-19, la réalité tangible de la mort s’impose à nouveau à toute la société, après des siècles de mise à distance, jusque dans nos quotidiens confinés1. Alors que nous vivons de mémoire d’homme sous le régime de la mort interdite, nous voyons resurgir le temps de la mort familière. C’est elle que l’on cherche à conjurer en aplatissant la courbe pour éviter de voir la saturation des système sanitaires et funéraires. Il n’empêche que l'énormité de l'événement est en train de suspendre le rapport ordinaire que nous entretenons avec la mort. En suivant les morts tués par le coronavirus, on découvre également que cette mortalité a un effet révélateur sur la société, en reportant les apories et les inégalités. Le politique retrouve des objets de discours oubliés et doit trouver les moyens de mettre en récit le décès de centaines de milliers de personnes.